Giacomo Santiago Rogado (*1979)
Quand Giacomo Santiago Rogado recourt au pinceau, à la peinture et à la toile, il n’est pas question pour lui de représenter quelque chose, il s’agit plutôt d’une exploration fondamentale de la peinture, de ses concepts, de ses techniques et de ses effets. L’éventail de sa création est donc large.
Élevé à Lucerne dans un milieu familial à la fois italien et espagnol, Rogado fait d’abord un apprentissage d'ébéniste, avant de fréquenter la Haute Ecole d'art et de design de Lucerne. Depuis le tout début, son travail artistique porte l'empreinte de l'artisanat, comme on le remarque dans les trois œuvres de Rogado appartenant à la Collection de la Mobilière. Au premier coup d’œil, elles ne semblent pas signées de la même main. On a d'un côté Puls (Pouls), un diptyque grand format datant de 2007, où des triangles à angles aigus et des sortes de gouttes s'ordonnent en dégradés de couleurs distinctes pour former une trame de rayures chatoyantes, qui semble inspirée autant de l’art optique et du néo-géo que du design textile du Bauhaus. Le dessin Fühler (Palpeur), également de 2007, fait d'abord l’effet d’une illustration tirée d'un manuel de cardiologie du XIXe siècle. Cette image d’une main qui tâte le pouls sur le poignet d’une autre tourne effectivement autour de la question centrale de l’art moderne, qui est de savoir comment mettre en image le senti et la matérialité propre au ressenti. Avec une précision proche de celle des maîtres anciens, ce dessin montre bien le paradoxe de cette idée. Universum 12 de 2008, en revanche, nous parle de la méticulosité de l’acte pictural et de l’art du lâcher prise. Rogado a peint pour cela 40 pois ronds de couleurs différentes à l’huile sur une toile brute. Ce qui, au premier coup d’œil, fait l’effet d’un commentaire ironique aux légendaires Spot Paintings de Damien Hirst, aux confins du domaine du design, se révèle être un état de suspension équilibrée entre l’ordre et le chaos, entre la couleur et le fond, un tableau sur l'acte de peindre: «La peinture est un processus mental qui se matérialise à la surface de la toile» explique Rogado dans une interview datant de 2014.
Aux côtés d’artistes comme Christine Streuli et David Renggli, Giacomo Santiago Rogado fait partie aujourd’hui d’une plus jeune génération d’artistes suisses qui, partant de positions concrètes, radicales et analytiques de la peinture, suivent leur propre voie.
Giacomo Santiago Rogado, né en 1979 à Lucerne (CHE), vit et travaille à Berlin (DEU).
Domaines d’activités: peinture, dessin
